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« On l'appelait Milady »

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AuteurMessage
Charlotte de Winter
♕ Je suis Charlotte de Winter
On l'appelait
♠M.I.L.A.D.Y♠

♟ Complots : 150
♟ Arrivée à Paris : 02/07/2012
♟ Localisation : Surtout là où on ne m'attend pas
♟ Profession : Espionne




Sous le sceaux du secret
Mon coeur balance:
Jeu d'espion: Au service du cardinal
Côté RP: Disponible
« On l'appelait Milady  »  Vide
MessageSujet: « On l'appelait Milady » « On l'appelait Milady  »  I_icon_minitimeLun 2 Juil - 8:11


Charlotte de Winter
par Vintage Phonic




HALTE-LA !


Où et quand êtes-vous né, voyageur ?
-> Entre 1599, dans le nord de la France
Où vivez-vous ?
->A Paris, à Londres… là où le Duc Rouge a besoin de moi
Et quelles sont vos origines ?
->Anglaise, française, peut être autre chose, allez savoir
Avez-vous un métier ?
->L’espionnage et l’assassinat sont-ils des métiers reconnus ?
Une occupation majeure ?
->Le complot et la trahison
Non ? Alors si vous êtes noble, quel est ou quels sont vos titres ?
->Comtesse de Winter, Lady Clarik… ou encore Madame de Bueil, Comtesse de La Fère, mais cela appartient à un passé révolu.
Je vois…êtes-vous marié ? Avez-vous des enfants ?
-> Je suis mariée, je suis veuve… ça cultive le mystère
Et votre visage, là, qui est-ce ?
->La méconnue Charlotte Poutrel






Et toi, derrière cet écran, qui es-tu donc ?

Comment te nomme-t-on par ici ? Cess ou Vintage Phonic, à vous de voir ^^
Et quel âge as-tu ? 22 ans
Tu as découvert notre forum sur le net ? Par un ami ? Par un autre moyen ? Par deux des admins qui m’en ont parlé
Et pourquoi avoir choisi ou créé ce personnage, qu’attends-tu pour son avenir ? Parce que Milady de Winter est un personnage aux innombrables facettes. J’attends de la faire évoluer et de la rendre encore plus géniale que dans le roman (avec tout le respect que je dois à Alex D. )
As-tu une remarque à faire sur le forum ? Aucune, il est parfaiiit

J'ai lu et accepte le règlement du forum







Dernière édition par Charlotte de Winter le Lun 2 Juil - 18:01, édité 3 fois
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MessageSujet: Re: « On l'appelait Milady » « On l'appelait Milady  »  I_icon_minitimeLun 2 Juil - 8:18

On l’appelait Milady






Il est des vies qui, bien plus qu’on le croit, ont mille et une facettes. Cette histoire n’en est qu’un simple exemple, mais un exemple flagrant. Quoi de mieux, pour la vie d’une espionne, que de brouiller les pistes et montrer qu’on sait bien mieux que les autres se faire oublier et changer d’identité comme on le souhaites. Mais chaque personne a ses origines, et elle au moins, les connait…

Vers la fin du XVI° siècle, alors que les guerres de religions étaient encore un souvenir assez vif, risquant à tout moment de rouvrir une plaie béante qui allait laisser une sanglante cicatrice à la France, un homme tomba amoureux d’une femme. C’est souvent ainsi que cela commence… Cet homme, William Backson, âgé de presque trente ans, n’était rien d’autre qu’un anglais. Un anglais protestant de surcroit. Mais qu’est ce qu’un tel homme pouvait bien faire ne France ? Comme certains de ses compatriotes, il avait accosté sur les côtes de France pour défendre sa foi, celle qu’il considérait comme la vraie foi, au côté des protestants français martyrisés par les papistes. Hélas, les papistes ne sont pas tous d’horribles démons… Parce que dans toute histoire d’amour, il faut de moitié qui s’unissent pour former un tout. Et la seconde moitié de ce tout avait dix-sept ans, tout au plus, portait de magnifiques cheveux blonds et un sourire d’ange. Elle s’appelait Anne. Anne de Bueil. Une peau si blanche et si douce qu’on eut cru de la soie. William tombait immédiatement sous le charme de cette apparition, et ne put plus penser à autre chose. Anne, de son côté, se consuma immédiatement d’amour. Un amour d’autant plus brulant qu’il était interdit. Seule héritière d’un petit manoir comme on en fait beaucoup dans le nord de la France, près de Lille. Une héritière qui n’attendait que le décès de son père pour convoler avec cet homme à qui personne n’accepterait de l’unir, jamais. Dans toute l’Europe, un mariage entre une catholique et un protestant était tout simplement inimaginable. Et pourtant… Pourtant, les miracles arrivent… Laissez-vous donc porter par cette histoire dont ces quelques lignes n’étaient que le commencement.

Là où tout a commencé :

-Guillaume, voulez-vous prendre pour épouse cette femme, ici présente.

-Je le veux ! murmura la voix d’homme mur, remplie d’amour, de fierté, de satisfaction et de désir.

-Anne, voulez-vous prendre cet homme pour époux ?

-Je le veux ! répondit timidement la voix féminine, qui semblait hésitante alors qu’elle était seulement émue.

-Par les liens sacrés du mariage, je vous déclare mari et femme jusqu’à ce que la mort vous sépare, acheva alors le prêtre.

Cela faisait seulement une semaine que Monsieur de Bueil était mort, et pourtant… Pourtant, déjà, sa fille, ne respectant pas son deuil, convolait avec celui qu’elle aimait, et qui l’aimait en retour. S’il avait fallu attendre l’autorisation de ce vieux satyre, jamais ils ne se seraient mariés. Non, bien au contraire, il aurait fait arrêter William, et Anne aurait été obligée d’épouser le fils d’un de ces bourgeois nouvellement enrichi, plein de suffisance et de certitude. Jamais ! Plutôt mourir ! Et c’est ce qui était arrivé, à son père. William n’avait pas cherché non plus à différer leur union. Sous le nom français de Guillaume Bassière, pour ne pas éveiller les soupçons, il avait épousé Anne, devant un prêtre catholique. Si la chose lui coutait énormément, il n’avait pourtant pas pu trouver de pasteur, et il lui pressait d’être uni à celle qu’il convoitait depuis maintenant des mois. Elle n’avait fait aucune difficulté. William prendrait ainsi le titre de Bueil, permettant au jeune couple de garder un minimum de revenu et un endroit pour habiter. La solde de William, qui ne lui était plus versée ou presque, n’aurait pas suffi à les nourrir.

Une fois les vœux prononcés, William attira Anne dans ses bras, et en douceur, mais fermement, la plaqua contre son torse pour lui donner ce premier baiser de vie commune, qui lie de manière officielle les jeunes épousés. Plus rien, leur semblait-il, ne pourrait les séparer.

---

-Breath my love, I beg you… murmura William qui tenait la main de son épouse, son anglais natal reprenant le dessus alors qu’il ne faisait plus attention à ce qui se passait autour de lui, totalement concentré par sa femme dont le front trempé de sueur, les cheveux défaits et le visage exsangue l’inquiétaient au plus haut point.

Jamais il n’aurait cru qu’elle puisse avoir tant de force, même au paroxysme de la douleur, qui semblait totalement l’épuiser. Dans cette chambre surchauffée par la cheminé bien entretenue, alors que dehors, l’orage se déchainait, Anne ne savait pas si elle allait réussir à tenir encore longtemps. Son ventre, distendu par neuf mois de grossesse, la brulait, la tiraillait, l’écartelait. Elle avait l’impression qu’elle allait mourir, emportant avec elle son enfant, l’enfant de William. Il fallait qu’elle tienne ! Pour eux deux, ses amours ! Jusqu’au bout. Quelle donne vie à ce petit ange, ce lien en plus qui l’unirait à son huguenot de mari. Elle ne se rendit même pas compte que la servante, ainsi que la ventrière, entraient dans la chambre avec des linges propres et une grosse marmite pleine d’eau. Cela sembla ramener William à la réalité, car le futur père – si Dieu, celui des protestants ou celui des catholiques, peu importait ! voulait bien lui accorder ce bonheur – s’écarta légèrement, mais au moment où sa main allait lâcher celle de son épouse à regret, celle-ci, comme mue par une ultime force de désespoir, ce redressa, s’accrochant à lui comme un naufragé à une épave.

-Reste ! Ne me quitte pas, je t’en supplie ! Je ne veux pas mourir… Je ne veux pas mourir…

Le cœur déchiré, William lança un regard à la ventrière, qui l’ignora superbement, se contentant d’écarter sans façon les jambes de la femme qui était en train d’accoucher, pour voir si elle pouvait faire quoi que ce soit pour la libérer au plus tôt. Cette femme avait surement mit bien plus d’enfants au monde que William avait jamais tué de catholiques… Il prit son ignorance pour un assentiment et se rassit à côté du lit, serrant la main de sa femme de toutes ses forces. Il se sentait horriblement… impuissant, inutile, ne pouvait l’aider en rien dans ce qui se passait, alors qu’il était le père de l’enfant à venir. C’était bien le seul moment où les hommes ne servent à rien !

-Il va encore falloir attendre, murmura la ventrière, dont le visage se voila d’une aura sombre.

Ce n’était pas normal. C’était trop long, et cela ne présageait rien de bon pour Anne. Elle était de trop faible constitution, trop chétive, trop mince… Trop tout en somme. Et pourtant, elle se raccrochait à la vie, comme si elle puisait son énergie par ce simple contact qu’elle entretenait avec son époux. Et l’orage qui ne voulait pas cesser, laissant cet ambiance lourde et glacée à la fois. Un orage au beau milieu de l’hiver, vous avez déjà vu ça vous ? C’était à croire que les éléments bien plus que les évènements avaient déjà compris quelle horrible démone allait venir au monde ce soir là. Echappée de l’enfer sous la forme d’un ange… Quelle ironie. Il se passa encore un peu plus d’une heure, pendant laquelle Anne intervertis les hurlements de douleurs et les gémissements étouffés, avant qu’enfin, un hurlement plus fort que les autres ne fasse intervenir la ventrière et ne tire la servante de la torpeur dans laquelle elle avait fini par s’enliser, seul William semblait être resté conscient. Cette fois-ci, la ventrière le repoussa sans ménagement, et comme si le simple fait de briser ce contact acheva la jeune femme, elle sombra dans une sorte de demi-conscience, ne pouvant faire autrement que de pousser pour libérer l’enfant de ces entrailles. Cela ne dura que quelques instants, à croire que toute l’attente d’auparavant avait été un simple coup de théâtre, préfigurant la vie entière de celle qui venait de naitre.

L’enfant hurla, à s’en décrocher les poumons, à croire que c’était lui qui avait happé toute la force vitale que sa mère venait de perdre. Immédiatement, la servante se précipita vers Anne pour essayer de la ranimer. William, totalement hébété, ne savait plus quoi faire. Il ne sembla revenir à lui que quand la ventrière, totalement sans émotion, lui fourra le bébé emmailloté dans les bras.

-C’est une fille, monsieur !

William laissa tomber son regard sur les deux yeux bleus qui s’étaient calmés, et qui immédiatement, le séduire, bien plus que ceux d’Anne il y a moins de deux ans. Le premier homme qu’elle faisait plier par un simple regard.

-William… murmura la voix étouffée d’Anne, qui semblait peu à peu reprendre conscience.

Le jeune homme releva les yeux vers sa femme qui lui tendait un bras faible, mais bel et bien vivant, aussi s’y précipita-t-il, tenant serrer dans ses bras cette nouvelle vie à laquelle il était déjà tant attaché. Il prit la main de son épouse pour la couvrir de baisés.

- Donne-la-moi.

Presque à regret, le jeune père s’exécuta. En son fort intérieur, Anne regrettait amèrement de ne pas lui avoir donné de fils, mais ça serait pour la prochaine fois. Serrant sa fille dans ses bras, Anne lui caressa la joue alors qu’elle semblait ne rien vouloir perdre de la scène qui se jouait entre ses parents, ses deux grands yeux ouverts et suivant tous les mouvements.

-Comment l’appellerons-nous ? demanda Anne, comprenant qu’il ne lui en voulait pas d’avoir mis au monde une fille par le simple regard qu’il jetait sur l’enfant.

-Anne, murmura-t-il, après un instant de réflexion. Parce qu’elle est aussi belle que sa mère.

Anne couva son époux d’un regard tendre et follement éprit, avant de tendre les lèvres vers lui, pour un baiser chaste et doux auquel il répondit sans se faire prier.

-Anne, répéta la jeune mère en prenant la petite main de sa fille dans la sienne…

---
-Father… I don’t want to study this anymore, this is boring… marmonna la petite tête blonde.

Elle avait quatre ans. Quatre années s’étaient écoulées depuis que la petite fille était née pendant cette nuit d’orage. Certes, la famille ne roulait pas sur l’or, mais William et Anne pourvoyaient à son éducation le mieux qu’ils pouvaient. Après tout, elle venait d’une famille respectée, et elle se devait de continuer à respecter cette tradition. Si elle vivait en France et avait une mère française – et catholique ! – elle était pourtant déjà parfaitement bilingue de par son père qui ne cessait de lui parler dans la langue de Shakespeare, l’anglais, cette langue jugée impure et venue de l’enfer par tous les représentants de la foi catholique, ou les papistes, comme les appelait si vulgairement William. Et en bon anglais et protestant qu’il était, il apprenait à sa fille leur vision de la foi, de Dieu, et de comment le prier. En anglais bien sûr. Sa mère n’appréciait pas, mais comme à chaque fois que son époux voulait faire quelque chose, il n’en faisait qu’à sa tête. C’était bien pour ça qu’elle était tombée amoureuse de lui, après tout. Et William savait bien comment la faire capituler. Surtout si leur petit trésor y ajoutait un immense sourire dont elle avait le secret et qui, déjà, la faisait ressembler à un ange. Anne cédait toujours. Et William aussi.

La petite accompagna sa plainte d’un regard qui aurait fait céder le pire des sans cœurs. Son père leva les yeux au ciel. Il n’y en avait plus rien à en tirer, il le savait bien. Une fois qu’elle était décidée, elle ne faisait plus rien de ce qu’on lui demandait. L’été était là, avec toutes ses occupations, et Anne avait bien plus envie de courir dans le jardin, essayant d’attraper des papillons, plutôt que d’écouter les prières anglaises que son père tentait de lui apprendre. Elle avait déjà assez avec monsieur le curé… D’ailleurs, bien qu’elle ne comprenne pas pourquoi, ses parents lui avaient toujours strictement interdit de parler anglais et de mentionner l’apprentissage que lui donnait son père en dehors de la maison. Une fois, une seule, elle avait commis une imprudence, devant ses amies du catéchisme, en leur disant que de toute façon, elle en savait bien plus qu’elles toutes réunies. Cela lui avait valu une soufflante mémorable. D’autant plus mémorable que jamais son père ne s’était avisé de la frapper jusque-là, pensant que le dialogue était bien plus efficace qu’autre chose. Vexée, et blessée, la petite s’était réfugiée dans sa chambre, et il avait fallu toute la diplomatie de sa mère pour qu’elle accepte de revenir parler à son père. Un caractère déjà bien trempé de princesse qui a bien l’intention d’avoir tout ce qu’elle veut quel qu’en soit le prix.

-Pleeeeaaaase… minauda-t-elle, en sachant bien que de toute façon, la partie était déjà gagnée.

Vaincu, William referma sa bible en anglais et leva les bras.

-Allright, leave…

-Thank you ! s’écria-t-elle en sautant à bas de la chaise avant de s’enfuir par la porte entrouverte, au moment où sa mère entrait dans la pièce.

-Où vas-tu ?

-Dans le jardin !

-Ne t’éloigne pas trop !

-Promis…

Promesse sur le sable, vite faite et vite effacée. Anne le savait bien, sa fille était un véritable feu follet qu’il était impossible de contrôler et de rattraper. Elle soupira, les mains sur les hanches, avant de s’approcher de son mari, en lui souriant. Du haut de ses vingt et un an, elle était encore plus belle que lorsqu’il était tombé amoureux d’elle. Il prit la main fine dans la sienne, qui ne tarderait pas à commencer à se rider, et y apposa un baiser.

-Tu lui passes tout… gronda la jeune femme sans véritable conviction.

-Que veux-tu, je ne peux pas résister aux femmes de ma vie, lui répondit-il avec un clin d’œil.

Il allait la prendre dans ses bras pour apposer un baiser sur ses lèvres quand une violente quinte de toux vint le secouer de toute part, sans qu’il puisse s’arrêter.

-William ?! s’écria la jeune femme, surprise et prise d’effroi.

Elle se précipita vers un peu d’eau qu’elle lui fit boire doucement. Il reprit sa respiration.

-Ce n’est rien, tout va bien… la rassura-t-il d’un sourire, encore pâle.

Et pourtant, ce n’était pas rien, et il le savait. Il trainait depuis son arrivée en France dans des conditions désastreuses une vilaine toux qui ne voulait pas le laisser en paix. Jusque-là, il avait toujours pu le cacher à son épouse. La crise n’avait jamais été aussi importante. Anne s’apprêtait à répliquer, quand une voix enfantine revint à la charge.

-Papa ! Papa ! Tu m’as promis !!! s’écria soudain la petite Anne en faisant voir sa frimousse blanche et ses cheveux tellement blonds qu’ils en paraissaient blancs à la lumière du soleil par la petite fenêtre de la salle à manger où se tenaient ses parents.

William leva les yeux au ciel. Il avait promis à sa fille de l’emmener monter à cheval. Sur son cheval, elle était trop petite encore pour en monter un seule. Il croisa le regard de son épouse, un rien réprobateur après la scène qui venait de se dérouler, et pourtant, l’anglais se leva.

-J’arrive, gente demoiselle. Vous me pardonnerez, ma dame, les impératifs du service.

Et avant que sa femme ait eu le temps de protester, il se dirigea vers sa fille.

-Venez par ici que je vous attrape, petite chipie.

-Noooon !!! s’écria l’enfant en partant en courant vers le petit bâtiment qui leur servait d’écurie.

Anne les suivis du regard, douce et inquiète à la fois. Elle regardait sa fille qui lui ressemblait tellement par le physique et dont pourtant, le caractère reflétait tellement son père. Elle était si petite, si fragile… Et pourtant elle avait failli être la seule à survivre la nuit de sa naissance. Anne se rasséréna. Leur fille était forte, il ne lui arriverait rien, surtout si William était là pour la protéger.

---

-Au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit, murmura le prêtre en faisant le signe de croix au-dessus du lit du mourant.

Anne de Bueil mère était en larme, tenant la main de son mari qui était presque aussi blanc que ses draps. Non ! Non ! Il ne pouvait pas l’abandonner ainsi ! Proche de la porte, n’osant pas bouger, la jeune Anne regardait ses parents, la rage au cœur et la mort dans l’âme. Rageuse envers Dieu, les deux qu’elle avait appris à prier, celui des protestants et celui des catholiques, qui ne lui venaient en aide ni l’un ni l’autre, alors qu’ils étaient censés être amour, et que maintes fois, son père lui avait dit qu’ils lui pardonneraient de les prier tous les deux alors qu’elle avait peur qu’ils lui en veuillent. C’était leurs fardeaux, William et à Anne, pas celui de leur fille, et pourtant, elle avait bien l’impression de payer leur romance interdite. Triste, enfin, infiniment triste, de sentir ce soutient si cher et si indispensable lui être peu à peu arraché. A peine se souvenait-elle de la gifle que sa mère lui avait mise quelques heures auparavant, quand elle avait ordonné à la bonne d’aller chercher le curé. Son père se moquait bien de cet homme d’Eglise, c’était d’un pasteur dont on avait besoin, et pourtant, il serait impossible d’en trouver un ici. Du haut de ses treize ans, elle avait fait face à sa mère, comme elle l’avait toujours fait, par jeu jusque-là, par bravade et respect de l’âme de son père aujourd’hui. Quand sa mère l’avait envoyée prier, ne se rendant pas compte de la portée de ses mots, elle avait répondu, suprêmement ironique :

-En anglais ou en latin ?

Sa mère, à bout de nerfs d’avoir veillé son époux depuis des mois et de sentir ce soutient lui être totalement arraché alors qu’elle n’avait jamais pu et jamais su vivre seule, avait senti son sang-froid la quitter, et avait giflé Anne, qui n’arrivait pas à y croire qu’elle venait de se faire traiter comme une enfant. Enfant qu’elle était pourtant…

-Anne… appela son père d’une voix éteinte.

Comme si elle n’attendait que cette invitation pour se précipiter vers lui, elle s’élança et s’agenouilla à côté du lit, prenant la main que son père lui tendait alors que sa mère tenait l’autre, alors que le prêtre les laissait en famille.

-Mes femmes… murmura-t-il, émut. Je vous aime toutes les deux. Veille sur ta mère, je te l’ordonne, ma fille.

Anne sentit les sanglots la gagner, et lui étouffer la voix, aussi ne put-elle que répondre un vague « oui » étouffé. Sa mère, en face, était aussi livide que son mari.

-Forgive-me, my God, I’m dying… murmura-t-il.

Et dans un dernier râle, William Backson, devenu Guillaume de Bueil, s’éteignit au milieu de l’après-midi, par une journée magnifique d’été 1612 où, la jeune Anne ne put s’empêcher de le penser, ils auraient dus aller faire la course à cheval le long de la rivière.

---

-Mon enfant, c’est une grande peine qui s’abat sur vous aujourd’hui…

Anne avait seize ans, et plus une seule larme à utiliser. Ces trois dernières années s’étaient apparentées à un enfer sur terre, et si cela préfigurait l’au-delà, alors elle espérait grandement qu’il n’y avait rien après la mort. Lentement, mais surement, depuis la mort de son père, sa mère s’était engouffrée dans une douce folie, ne s’alimentant plus, ou presque, perdant peu à peu de ses couleurs et de sa force. Ses traits étaient devenus si fin et sa peau si pâle qu’Anne avait eut peur qu’elle ne tombe en poussière au moindre contact, surtout les derniers mois, qu’elle avait passé principalement au lit. Parfois, au milieu de la nuit, la jeune fille était réveillée en sursaut par les hurlements de sa mère, appelant son père dans un demi-cauchemar, à la lisière de la réalité, mais son esprit usé ne faisait plus la différence entre réalité et fantasme. Pourtant, parfois, pendant de brefs instants, elle laissait place à une lueur de lucidité, un éclair qui ne durait pourtant pas. Et c’était pendant l’un de ces moments trop brefs aux yeux de la jeune Anne qui ne savait plus comment faire face à cette situation, que sa mère avait écrit à la mère supérieure du couvent de Templemar. S’assurer que sa fille, une fois qu’elle ne serait plus – car c’était inévitable, elle en avait conscience dans ces moments de lucidité, et au fond, n’aspirait qu’à cela, rejoindre son époux tant aimé dans l’au-delà – aurait quelqu’un vers qui se tourner. Trois jours plus tôt, comme tous les matins, Anne s’était levée et avait passé le seuil de la chambre de sa mère, pour ouvrir les rideaux et laisser entrer la lumière du jour, mais Madame de Bueil n’avait pas bougé, elle ne bougerait jamais plus… L’enterrement avait été organisé rapidement, discrètement. Et c’est encore vêtue de sa robe noire que la jeune femme se tenait face à la mère supérieure. Cette vieille femme, sèche et dure, qui semblait horriblement stricte. Sa compassion paraissait être du dédain, et Anne, toute à sa peine, n’avait pas encore comprit dans quel piège elle était tombée. Elle continuait à fixer le bureau, comme sans le voir, quand la mère supérieure reprit :

-Il est donc tout naturel que nous acceptions la requête de votre mère. Vous serez élevée ici, et prendrez le voir une fois votre noviciat terminé, vos biens de Bueil seront vendus et le bénéfice tiré reviendra au couvent…

-Quoi ?

Anne avait violemment relevé la tête. Non ! Non !! Elle ne pouvait pas dire vrai ! Sa mère n’avait jamais voulu une telle chose, la jeune fille en était certaine. Elle voulait un mariage pour sa fille, un grand mariage, si possible, et ces quelques années au couvent n’étaient là que pour parfaire son éducation. C’était impossible ! C’était un cauchemar ! Ces trois dernières années n’étaient qu’un horrible cauchemar duquel elle allait se réveiller sous peu. La mère supérieure leva un sourcil mécontent à la réaction de la jeune fille, qui continua pourtant sur sa lancée :

-Il doit y avoir une erreur, ma mère ! Je vous assure ! Maman n’a jamais pu vouloir une chose pareille…

-Allons ma fille ! Un peu de tenu ! Le couvent n’est pas le bagne. Votre mère voulait votre bien, et nous l’allons faire pour elle, voilà tout.

-Mais…

-Contesteriez-vous les dernières volontés de madame votre mère ?

Anne se dressa soudain, voulant s’enfuir. Où ? Comment ? Elle n’en savait rien. Les murs autour d’elle lui donnèrent l’horrible impression de se resserrer, comme s’ils allaient l’étouffer, la tuer à petit feu. L’esprit en feu des évènements de ces derniers jours, la tête se mit à lui tourner, et avant qu’elle ait eut le temps de se rassoir, elle s’effondra sur les carreaux en terre cuite du sol, sans connaissance.

Quand elle s’éveilla, il faisait presque nuit, elle était dans une cellule, pauvrement meublée, et horriblement froide, semblant totalement vide malgré sa petite taille. Ce n’était pas un rêve, mais bel et bien la réalité. A partir de cet instant, un seul objectif anima l’esprit de la jeune femme : fuir, par tous les moyens.

---

-Anne, je vous en pris… murmura le jeune prêtre, le visage en feu, avant de glisser sa tête dans ses mains.

Cela faisait des mois… Des mois que la jeune femme était enfermée dans cet endroit sans vie, où elle avait l’impression de s’étioler comme une fleur, forcée, au bout de quelques semaines, pour éviter que quiconque puisse la réclamer, de prononcer des vœux auxquels elle ne croyait pas le moins du monde, mais il valait mieux endormir la méfiance de ses geôliers si elle voulait être certaine de pouvoir fuir, un jour, bientôt. Très bientôt. Et puis, lors de la confession, elle l’avait remarqué. Ce prêtre, jeune… Trop jeune pour être sur de lui encore. Mais il devait avoir au moins trente ans pour avoir prononcé ses vœux de prêtrise. Pourtant, physiquement, il faisait beaucoup plus jeune. La jeune femme avait apprit bien des choses, avant d’entrer au couvent. Après tout, ses trois dernières années de liberté, elle les avait passées livrée à elle-même. Elle avait apprit à connaitre les hommes, leurs désirs secrets, leurs volontés, ceux que même Dieu ne pouvait éteindre. Malgré ses cheveux coupés sous la coiffe de none, elle avait su garder une expression angélique, séduisante, qui faisait baisser la garde à tous, hommes comme femmes. Elle s’arrangeait toujours pour se confesser à ce jeune homme, allant toujours un peu plus loin. Lui racontant d’abord ses regrets de sa vie d’avant le couvent, puis des choses plus intimes, comme ses rêves. Des rêves qui se faisaient de plus en plus indiscrets. Où Jean – c’était son nom – tenait une place de plus en plus importante. Au fur et à mesure des confessions, il ne savait plus quoi faire. Dès le premier regard, il l’avait remarquée. Elle était bien trop belle, bien trop gracieuse pour une telle place, un tel vêtement que celui qu’elle portait. Son esprit, qu’il avait vainement essayé de tourner vers l’étude, revenant souvent vers ce visage aux grands yeux bleus, encadré de courts cheveux blonds qui parfois dépassaient en quelques fines mèches de sa coiffe. Il avait tenté de l’orienter vers un autre prête, mais rien à faire. Quand il ne la voyait pas à confesse, il s’inquiétait, et quand il la voyait, il perdait pied.

Anne sourit pourtant dans l’obscurité du confessionnal, il avait dit son nom, elle allait gagner. Elle le savait. Des mois à le pousser, à le faire changer d’avis, à l’empêcher de douter et à le tenter. Et elle allait y arriver. Elle ne savait pas encore qu’elle manquait cruellement de pratique et que d’ici quelques années, il lui faudrait seulement quelques jours pour séduire un homme qui la méprisait au départ.

-Arrêter quoi, Jean ? Je vous en pris, murmura-t-elle en prenant la voix la plus suave possible, et en glissant ses doigts si fins à travers le grillage qui la séparait de la cabine du prêtre. Je vous aime ! Voilà, je l’ai dis. Dieu ne peut nous avoir placé sur la route l’un de l’autre, animant ce sentiment, pour mieux nous séparer ensuite, Il est bon, Il nous protègera…

-Et si c’était le diable ? lâcha le jeune homme sans sortir sa tête de ses mains.

-Ce n’est pas du désir, cela, seul le Diable aurait pu nous le souffler, mais de l’amour, le plus pur sentiment créé par le Seigneur. Je vous en prie… Ne me forcez pas à vivre loin de vous, ou je vous jure, j’en mourrai !

L’accent de sincérité était si fort que le jeune prêtre s’y laissa prendre sans même imaginer une seule seconde qu’on pouvait lui tendre un piège.

-… Ou… Est-ce, que, vous, vous ne m’aimez pas ?

Soudain il se redressa et couvrit de ses mains les doigts de la jeune femme, avant de se pencher pour les couvrir de baiser.

-Oh ! Je vous aime, Anne, comment pouvez-vous en douter ?

Elle eut un soupire à fendre l’âme, avant de retirer ses doigts de la petite grille en osier et de se laisser aller contre la paroi du confessionnal.

-Vous me le montrez bien mal… Je ne demande qu’à être avec vous. Vous me parlez de devoir, mais notre rencontre est la seule volonté de Dieu, ne croyez vous pas qu’il m’en coûte de trahir ces vœux que j’ai prononcé pour lui ? Mais si ce sentiment en était l’extension ? Je vous en prie… Je brûle d’être à vous, totalement ! Je me moque de ce que penseront les hommes, car il n’y a qu’à Dieu que nous devrons rendre compte.

Le désir du jeune homme se raviva vivement. Il y avait si longtemps qu’il n’avait pas connu la douceur d’un corps de femme. Et il imaginait sans peine la perfection de celui de la jeune femme, si belle, si jeune, jamais touchée encore… Il eut un soupir résigné.

-Que me faut-il faire ?

Dans l’obscurité, les yeux d’Anne se mirent à briller d’une lueur mauvaise. Elle avait réussi, elle allait sortir d’ici, de cet endroit horrible auquel on l’avait enchainée malgré elle. Non, elle ne se laisserait pas faire ! Elle se vengerait ! Essayant de reprendre une voix douce et tremblante d’agnelle apeurée, elle murmura à toute vitesse.

-Pour fuir, loin, il nous faut de l’argent, beaucoup d’argent. Ce couvent m’a tout volé, vous le savez, il n’est que justice qu’il participe à notre fuite. Connaissez-vous les vases sacrés qui ornent l’hôtel ?

-Oui ?

-Il nous les faut ! La vente d’un seul nous permettrait de fuir loin, et celle du second nous donnerait de quoi vivre pendant plusieurs mois. Demain est jour de visite, personne ne fera attention à personne. Je pourrais me glisser dans le potager, et utiliser la petite porte que le jardinier emprunte. Je lui ai d’ors et déjà subtilisé la clef dans l’espoir que vous diriez « oui ». Oh mon amour, demain me parait si loin déjà.

Résigné, vaincu, Jean baissa la tête. Dieu lui pardonnerait-il son égarement ? Déjà, il savait qu’il n’arriverait pas à se pardonner lui-même sa faiblesse, mais l’amour qu’il portait à la jolie blonde ne pourrait tout de même le mener jusqu’en enfer ?

---

Anne se regardait dans le miroir de la petite chambre d’auberge dans laquelle elle et son amant avaient trouvés refuge. Elle ne se reconnaissait pas, ne se reconnaissait plus. Tout s’était passé à merveille, exactement selon ses plans. A peine les visites avaient-elles commencées qu’elle s’était glissé au jardin et avait passé la porte, avant de la refermer soigneusement derrière elle. Sa coiffe blanche était partie au vent après qu’elle l’ait arrachée de sa tête comme si elle la brulait, le chapelet qu’elle portait à la taille suivit rapidement. La robe faisait encore très moniale, mais elle ne pouvait pas faire mieux pour le moment. Elle espérait que la robe que Jean devait lui apporter serait un peu plus discrète, tout en se doutant bien qu’il lui faudrait vite en racheter d’autres, il n’avait aucun goût. Comme prévu, les amants s’étaient retrouvés, et avaient filé le plus vite possible dans le village voisin. Le jeune prêtre avait déjà payé la chambre dans laquelle ils s’étaient réfugiés. Un instant, Anne avait eu peur. Elle savait bien quel serait le prix à payer pour remercier son « sauveur ». Elle ne connaissait des rapports entre les hommes et les femmes que ce qu’elle avait entendu des gloussements de la servante avec ses amants, chez ses parents, et les rares gémissements qu’elle avait perçu dans la chambre de ceux qui lui avaient donné la vie. Et pourtant, elle le savait, Jean n’attendrait pas plus. Essayant d’oublier son effroi, elle s’était laissé aimer et prendre à la volonté du jeune homme. Il avait été un amant doux, tendre et passionné, et pourtant, elle avait un horrible goût de regret dans la bouche. Cela n’aurait jamais dus se passer comme ça, jamais ! Aux premières lueurs du jour, alors qu’elle feignait le sommeil de peur qu’il ne la touche à nouveau, Jean était sorti du lit, et c’était habillé avant de la quitter le plus silencieusement possible, prenant les vases sacrés avec lui. Comment les avait-il subtilisés ? Mystères… Anne n’avait pas pris le temps de lui poser la question, et au final, elle s’en moquait éperdument. Seule la fin la préoccupait, les détails elle n’en avait que faire. En se levant, elle avait trouvé la robe qu’il lui avait amenée, et l’avait enfilée, avant de s’assoir dans la coiffeuse pour essayer de discipliner sa chevelure rebelle. Et son reflet l’avait stoppée. Qu’elle était pâle désormais, qu’elle était mince… Et ses cheveux n’avaient pas repris leur longueur d’antan. Elle paraissait flotter dans l’habit qui auparavant, lui aurait été à ravir. Que de changements en quelques mois… Elle sentait les larmes lui monter aux yeux et s’apprêtait à pleurer quand soudain la porte de la chambre de l’auberge sauta et deux hommes en livré du guet entrèrent dans la pièce.

-Saisissez-la ! lança une voix froide.

D’un bond, Anne fut debout et recula jusqu’au mur, cherchant un échappatoire quelconque, se mettant hurler de toute ses forces, se débattant, mais du haut de ses seize ans, elle ne faisait pas le poids face aux hommes d’armes.

-Que me voulez-vous ? Laissez-moi, lâchez-moi, au secours ! hurlait-elle de toutes ses forces.

Les deux gardes la prirent chacun par un bras avant de la sortir de la chambre. Dans la cours de l’hôtellerie, un officier attendait, un ordre à la main. C’est sans manifester la moindre émotion qu’il en lut le contenu :

-Anne de Bueil, vous êtes accusée de vous êtes défroquée, d’avoir séduit et perverti un prêtre, ainsi que du vol de deux vases sacrés au couvent de Templemar. Jusqu’à plus amples informations et procès, vous serez détenus en la prison de la ville. Allez !

La jeune femme, hébétée, fut jetée sans ménagement dans la voiture amenée à son intention, avec ses deux gardiens, et immédiatement, elle partit. Il ne lui fallut pas bien longtemps pour comprendre que Jean, cet imbécile, s’était fait prendre, et qu’il avait parlé, qu’il avait tout dit. Elle était perdue, cette fois-ci, définitivement…

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-Anne, mon amour, pardon, pardon !

Les cris de Jean avaient raisonnés quand elle était passée devant sa cellule encadrée par les deux gardes, elle ne l’avait même pas regardé. Il ne lui était plus utile, désormais. Tout ce qui comptait, c’était qu’elle réussisse à sortir d’ici. Par tous les moyens. Non, elle ne voulait pas mourir, et n’avait pas échappé à l’agonie lente du couvent pour replonger dans une autre, bien plus courte, surement, ici, entre ces barreaux. La prison était froide, humide, mais la paillasse semblait propre, et elle était seule dans sa cellule. Cela lui permit de réfléchir à bon escient. Combien de temps était-il passé depuis qu’elle était là ? Deux jours, trois peut être ? Elle ne savait plus vraiment. Par contre, ce qu’elle savait, c’est que le gardien passait son temps à ouvrir le judas de sa geôle. Anne ne mit pas longtemps à comprendre pourquoi. Elle était jeune, mais sa naïveté s’était totalement envolée. Elle l’avait déjà compris au regard de Jean à travers ses habits de moniale, elle était jeune, belle, et surtout désirable. Alors dans une robe un peu plus proche du corps et qui révélait ses formes, cela devait être bien plus visible. Agenouillée devant la paillasse, elle priait, ou plutôt, faisait comme si, guettant l’arrivée du garde. Elle avait mis des mois à séduire Jean et à le convaincre. Mais le geôlier semblait être bien moins pieux. Et il ne lui fallut pas longtemps pour établir son plan. Il était obligé d’entrer dans sa cellule pour lui donner son repas, cela lui faisait un moyen de lui parler, dont elle ne se priva pas. L’œilleton se referma, et la jeune femme soupira, avant de s’étendre sur sa paillasse dans une position alanguie, et en même temps qui ne soupçonnait aucun artifice de par l’air angélique de ses traits. On s’y serait laissé prendre.

Le geôlier entra, elle ne bougea pas. Il resta-là, un certain temps, à la regarder, semblant hésité. A travers ses longs cils, elle pouvait deviner sa silhouette qui restait là. Elle eut une respiration plus importante, mettant sa poitrine en avant, et le geôlier n’hésita plus. Après tout, il n’y avait pas de mal à se faire du bien, et puis elle serait surement condamnée. On ne se défroque pas, et on ne vole pas les biens de Dieu ! Fermant la porte, il s’approcha de la jeune femme, et elle sentit sa respiration fétide, pourtant, faisant un énorme effort sur elle-même, elle ne bougea pas, feignant toujours le sommeil. Ce n’est que quand elle le senti s’allonger sur elle qu’elle rouvrit les yeux, et saisit le broc en terre cuite qui lui servait à boire, pour le fracasser sur la tête de son geôlier, qui tomba à terre, évanoui. Immédiatement, elle se releva, et, nerveuse et fébrile, elle s’agenouilla à son côté, ayant peur qu’il ne reprenne connaissance à tout instant, et saisit le trousseau de clef qu’il portait à la taille, s’arrêta, hésitant un instant à se décider à subtiliser la bourse qu’il portait également, avant de sortir de la cellule et de l’y enfermer. Elle n’avait pas vraiment réfléchit à comment sortir de là, mais elle y arriverait bien il le fallait !

Elle se mit à longer les couloirs, n’ayant absolument aucune idée d’où elle était, et se dissimulant dans l’ombre dès qu’un bruit se faisait entendre. Deux gardes passant dans le couloir perpendiculaires lui indiquèrent l’emplacement de la salle des geôliers qui devait se trouver vers la sortie. Inspirant pour prendre du courage, elle traversa le couloir, et s’arrêta juste devant la salle des geôliers, toujours son trousseau à la main. Il fallait faire vite. Personne dans la salle. La chance aurait-elle décidé d’être avec elle ? Une cape aux couleurs de la ville se trouvait là. Elle ne réfléchit pas en la saisissant et en rabattant la capuche sur ses traits juvéniles. Cela lui permit de sortir sans difficulté. Pourtant, son cœur de cessa de battre, comme s’il cherchait à sortir de sa poitrine. Les sentinelles à la poterne ne lui accordèrent aucune attention alors qu’elle passait la porte de la citadelle. Elle était libre, à nouveau, et comptait bien le rester, pour toujours cette fois-ci. Elle n’eut même pas une pensée pour Jean, l’homme qu’elle venait de perdre et qui pourtant l’aimait plus que tout. Pas plus qu’elle ne se douta que le chariot qu’elle croisa contenait le bourreau qui allait châtier son amant. Plus, son frère, et qui crierait vengeance envers la tentatrice. Elle avait seize ans, et était libre à nouveau. Anne se sentait inatteignable et forte. Rien ne l’arrêterait plus jamais !

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Une autre hôtellerie, une autre ville, loin, bien plus loin que son Nord natal… Anne venait de passer Orléans. C’était avec un millier de précautions et beaucoup de difficultés que la jeune femme avait quitté les environs de Lille, un mois auparavant. La bourse de son geôlier avait été utilisée avec parcimonie, forçant la jeune femme à descendre dans des estaminets minables où elle se faisait la plus discrète possible, ce qui était plutôt difficile avec son joli et jeune minois. Une jeune femme voyageant seule risquait gros, aussi était-elle ravie que son père ait jadis pensé à lui apprendre le maniement des poignards et dagues, se doutant sans doute que sa fille serait parfois amenée à utiliser ce genre de choses pour se protéger. Elle voyageait parfois à pied, mais le plus souvent, son charmant sourire et une histoire à moitié inventée de mère décédée et de tante à rejoindre dans le sud de la France mais qui n’avait pas plus de moyen qu’elle poussait les marchands à la prendre avec eux dans leurs charriots rengorgeant de mille et une choses parfois totalement inconnues à la jeune fille, mais, avide de découvrir, elle retenait tout, ou presque. Les étoffes, les modes, la forme des vêtements… Elle se promettait à part elle qu’elle réussirait à tout avoir un jour, que tout lui appartiendrait et qu’on ne pourrait rien lui refuser. Une petite vengeance personnelle contre le monde, et surtout un pied de nez à ceux qui avaient voulus l’enfermer derrière ces murs ternes et gris. Elle ne pensait jamais à Jean, ou si peu. Elle l’avait précipité en enfer, et l’avait laissé à son sort, sans le moindre remord. Il avait lorgné sur son corps, comme son geôlier, comme ces hommes qui la prenaient dans leurs attelages – et à qui parfois, elle était obligée de céder – et s’en était trouvé très mal senti. Pourtant, dans ces petits « arrangements » de transport, elle trouvait son compte, subtilisant ça et là quelques objets lui permettant de survivre. Une robe plus ou moins neuve, mais au moins de meilleure facture que l’ancienne, une cape du même acabit, quelques affaires de toilettes, une autre paire de bas, propre et nette et une petite valise en maroquin pour contenir le tout, lui donnaient un air plus respectable pour voyager. Cette épreuve avait légèrement durci ses traits la faisant paraitre un peu plus âgée que ce qu’elle n’était réellement. Et l’auberge du petit village dans laquelle elle avait trouvé refuge pour la nuit, la seule d’ailleurs, était un peu mieux tenue que celles qu’elle avait fréquenté récemment, même si elle préférait les chemins de traverses aux grandes routes.

Il y avait longtemps qu’elle était partie, Lille était loin, elle ne risquait plus rien. C’était ce qu’elle se répétait sans cesse. Pourtant, depuis l’après-midi, un homme était arrivé dans l’établissement, et il avait bien vilaine tournure, dans sa cape noire et apparemment distant, il n’avait cessé de l’observer. Anne, attendant le prochain marchand qui pourrait l’amener encore plus au sud, était coincée là avec cette impression étrange qu’il était là pour elle. Mais cela ne pouvait être qu’une illusion d’enfant. Le contraire, après tout, ne se pouvait. Sa mère avait raison, elle avait lu bien trop de livres et de tragédies étant enfant. Pourtant, elle n’arrivait pas à dormir, et dans sa robe de chambre, assise dans la petite chaise devant la cheminé, elle cherchait comment se tirer de cet endroit au plus vite. Partir par les routes était hors de question, la tempête dehors faisait rage. A tel point qu’elle essayait de se persuader que c’était cela qui l’empêchait de dormir plutôt que son imagination galopant au loin dans les pires idées, oubliant volontairement que des tempêtes de ce genre, elle en avait vécu des pires chez ses parents. Le vent faisait craquer la vieille auberge, les volets fermés battant contre le mur. Soudain, il lui sembla qu’on essayait d’ouvrir la porte. Se redressant, elle fixa le panneau en bois un long moment, mais non, rien. Son imagination, décidément ne cessait de la perturber. Elle fixa le feu, vif, qui craqua. Et cette fois-ci, elle fut certaine que la porte avait été testée. Se levant, le plus discrètement possible, vérifia le verrou. Il était bien en place, il ne s’était rien passé. Essayant de se résonner définitivement, elle retourna vers la cheminé, y rajouta une buche, avant de se glisser dans les draps humides et glacés. Le sommeil, troublé, léger, lui vint pourtant. Elle fut éveillée par un craquement de pas sur le parquet, mais avant d’avoir réalisé ce qu’il se passait, une main large, puissante, la saisit par le bras et la tira hors du lit, pendant que l’autre se plaquait sur sa bouche, l’empêchant de crier. Trop choquée, elle n’y pensa même pas. A la main se substitua un bâillon en tissu enfoncé tellement profondément dans sa gorge qu’elle crut étouffer, et un lien attacha ses deux mains dans son dos. Tremblante, en larme, gémissant, Anne fut jetée sans ménagement contre le mur, alors que l’homme, dans une grande cape noire, qu’elle reconnut comme étant celle de l’homme de la salle du déjeuner, mettait quelque chose ressemblant à un tisonnier à chauffer dans la cheminé. Attendant, il fit pivoter la chaise face à la jeune fille, et s’y installa.

-Il y a longtemps que je te cherche, putain…

Anne voulut crier mais le bâillon l’en empêcha. Des larmes coulaient le long de ses joues, alors que, victime impuissante, elle regardait l’homme qui ne semblait pas lui vouloir que du bien, mais s’il avait voulu profiter d’elle, il l’aurait déjà fait. Elle avait assez apprit à connaitre les hommes ces derniers temps pour le savoir.

-Sais-tu qui je suis… ?

Elle fit vivement « non » de la tête, ayant envie de le supplier, de le prier, de l’implorer de la laisser partir, qu’il devait surement la confondre avec une autre, qu’elle ne pouvait pas lui avoir fait quoi que ce soit.

-Je suis le bourreau de Lille.

La jeune fille senti le sang quitter son visage, et la paniquer grandir en elle. Non, cela ne pouvait pas la poursuivre jusque-là, plus maintenant, elle était trop loin. Pitié… Que le ciel prenne pitié ! Que l’un de ces Dieux qu’elle avait appris à aimer étant enfant se manifeste enfin !

-Mais pour toi, cela ne doit pas vouloir dire grand-chose. Je suis surtout le frère de l’homme que par ton vice, tes promesses et ta manipulation, tu as attiré sur la pente la plus glissante et la moins honorable. Un homme saint ! Et ta perversion m’a conduit à marquer du signe des voleurs mon propre frère. Te rends-tu compte, garce ?

Avec un rictus cynique, il ajouta :

-Une fille de ton âge, blonde, et qui prend les chemins de traverse, ça se suit facilement…

Anne n’était même plus en mesure de réfléchir. Tout en elle n’était que chamboulement et elle essaya de se débattre pour se remettre debout, alors qu’il la regardait, avec un air cruel. Comme un animal blessé, elle voulait fuir, loin, au plus vite, survivre, ne pas mourir. La jeune fille tenta de se débarrasser du morceau de tissu qui l’empêchait de parler, mais ne réussit qu’à se l’enfoncer plus profondément dans la gorge, manquant de s’étouffer à nouveau.

-Et maintenant, je vais le venger… Il n’y a pas de raison que la fomentatrice du forfait ne partage pas le sort de l’exécutant, n’est-ce pas ?

Les yeux d’Anne s’ouvrir en grand. Elle venait de comprendre ce qu’il avait mis dans le feu, et son teint déjà blême pâlit à nouveau. Elle se mit à secouer vivement la tête, essayant de se remettre debout pour s’enfuir. Le bourreau sembla goutter son effet avant de se relever, et de juger le fer assez chaud. Tenant son tison, il s’approcha de la jeune fille, et, la saisissant par les cheveux, la força à se redresser un peu, avant de déchirer sans sommation le haut de sa chemise de nuit, nullement attendri par les formes encore infantiles de cette femme qui avait déjà tant péché malgré son jeune âge. D’un geste vif, il appliqua le fer en forme de fleur de lys sur l’épaule gauche de la jeune femme, dont le hurlement de douleur et les larmes de haines furent noyées par le bâillon. Au comble de la douleur, elle s’évanouie, avec une pensée, encore et toujours la même, cette certitude qu’elle ne voulait pas mourir.

---

Elle rouvrit les yeux, la tempête semblait s’être calmée. Plus aucun bruit ne parvenait de l’extérieur. Elle était toujours par terre, à moitié dénudée, mais le bourreau avait disparu. Elle se redressa, en douceur, le corps meurtri par la position inconfortable dans laquelle elle avait été forcée de rester. Ce n’est qu’en appuyant le bras gauche sur le sol qu’elle senti la vive douleur, cuisante, de son épaule, qui céda sous son poids et la força à se laisser aller contre le sol. D’un geste, elle jeta un coup d’œil à son épaule meurtrie. La fleur de lys, celle des voleuses, des filles de mauvaise vie. Elle sentit son cœur se serrer, et son ventre se broyer. La peur, la haine, la rage la forcèrent à vomir de la bile sur le parquet, où elle se laissa glisser tremblante. Ses poignets portaient encore la marque des liens de la nuit dernière. Marquée à vie… La rage et la peur se mêlaient en elle pour ne faire plus qu’un. Que pouvait-elle faire maintenant ?

---

L’abattement de la jeune femme ne dura que quelques heures. Elle sombra dans une torpeur dont elle s’éveilla épuisée, endolorie, mais déterminée à ne pas se laisser abattre. Précautionneusement, elle s’était occupée de la brûlure, y appliquant un baume et un bout de linge visant à la protéger du frottement des tissus de sa robe. Qu’est-ce qu’une marque après tout ? Habilement dissimulée, personne ne saura ni n’y fera attention. Il fallait bien se raccrocher à quelque chose. Elle avait hésité à sortir de sa chambre, de peur de croiser le bourreau à nouveau. Elle dut attendre que la soubrette, déléguée par son maître légèrement inquiété de l’absence de sa jeune hôte, gratte à la porte et de lui demander si l’homme était toujours là, ce à quoi la petite brune, guère plus âgée qu’Anne, lui répondit que non, pour oser mettre un pied dehors. Ne voulant pas trainer encore là, la jeune femme paya sa note et décida de commencer à marcher jusqu’au prochain village, pour mettre de la distance entre elle et ce cauchemar tout à fait réel qui viendrait la hanter régulièrement la nuit.

---

Quelle ne fut pas sa surprise, quelques jours plus tard, de voir Jean passer la porte de la petite auberge du village du Berry dans laquelle elle s’était réfugiée dans sa fuite en avant, sans réellement savoir où aller ni ce qu’elle voulait faire, à part mettre presque toute la France entre elle et son passé. Le Berry était assez loin de Lille, non ? Jean, dans son aveuglement amoureux, n’eut pas un seul instant l’idée de lui demander pourquoi elle l’avait laissé là et lui faire le moindre reproche. Une fois seuls dans la chambre qu’elle avait louée, le faisant passer pour son frère, pour expliquer pourquoi elle lui permettait de pénétrer dans sa chambre, sous le regard sourcilleux de la patronne qui semblait très attachée à la pensée chrétienne dans sa maison. A peine la porte refermée sur le petit couple, que Jean se jeta à ses pieds, embrassant le bas de sa robe.

-Anne, mon amour, je vous en prie, pardonnez-moi. Je suis indigne de vous…

Il s’était un peu redressée pour saisir ses mains, sans voir le regard dégouté que la jeune femme lui jetait, avant qu’elle ne recule, et se détourne. Il fallait qu’elle se calme, et qu’elle fasse contre mauvaise fortune bon cœur – si l’expression se portait au moment. Après tout, cet imbécile lui était totalement dévoué, et il pouvait toujours lui servir. Aussi prit-elle un air d’ange blessé, avant de tourner son regard bleu captivant vers lui, papillonnant outrageusement, alors qu’il se redressait pour la prendre dans ses bras, geste qu’elle arrêta en levant la main, et d’une voix meurtrie.

-Je vous en supplie, non…

Elle s’effondra sur le lit, le visage entre les mains, pleurant des larmes aussi vraies que possibles malgré l’opposition de ses sentiments. Jean, troublé, s’assit à son côté, passant un bras autour de ses épaules. Mais là encore, elle se déroba.

-Ne me touchez pas, pitié. Vous ne savez pas ce qu’il m’est arrivé.

Avec force détails, la jeune femme entreprit de lui raconter comment, au risque de sa vertu, elle avait réussi à s’échapper et à survivre, avant de fuir vers le sud, où le frère de son amant l’avait retrouvée, et marquée. A ces mots, Jean pâlit.

-Oui, marquée, monsieur, comme du bétail !

D’un geste théâtral, elle défit sa robe pour lui montrer son épaule, oubliant volontairement qu’il portait la même au même endroit qu’elle. Jean détourna la tête, et murmura d’une voix éteinte :

-Je vous en prie, couvrez-vous…

-Ces formes ne semblaient pas vous rebuter, il y a peu !

Jean se leva et marcha vers elle, mais là encore elle recula, refusant qu’il la touche. Son plan était totalement formé dans son esprit, il ne la toucherait plus tant qu’elle ne l’accepterait pas. Il était dans un tel état d’abattement que la jeune femme savait qu’elle pourrait en faire exactement ce qu’elle voudrait.

-Dans ces conditions, il vaut mieux que nous continuions à nous faire passer pour un frère et sa sœur.

-Mais…

-Ne discutez pas, je vous en prie ! Après vous avoir présenté comme tel en bas, il vaut mieux que cela reste ainsi. Surtout si nous devons nous installer ici…

Le ton s’était fait plus enjôleur, plus doux, ranimant la flamme dans la prunelle de Jean qui sourit, comme un enfant à qui on faisait miroiter une nouvelle douceur.

-Vraiment ?

-Oui… La région me plait, je m’y sens déjà comme chez moi.

Et le regard du jeune Comte de la Fère, propriétaire des terres sur lesquelles ils se trouvaient, qui était passé par ici le matin même en revenant de la chasse, et s’était attardé sur elle un long moment avant de chuchoter quelque chose à un de ses compagnons n’y était sans doute pas indifférent…

---

-Monseigneur, c’est magnifique… murmura Anne, sincèrement ébahie.

Le comte de la Fère avait fait ce qu’il avait promis, assurant ainsi à Anne à quel point elle était charmante et séduisante. Au cours des jours qui avaient suivis, le comte s’était fait présenté, et la jeune femme l’avait surpris, à si bien connaitre les chevaux, la chasse, les lettres… Etait-elle vraiment d’obscure naissance ? Elle avait souri, sans répondre. S’il avait su… Elle lui avait présenté son « frère », qui avait joué son rôle à la perfection, malgré la scène de jalousie qu’il lui avait faite le soir même. Anne l’avait laissé faire, remettant à plus tard la mise au point qu’elle lui ferait surement. Pourtant, en parlant de son frère, elle avait laissé courir qu’il était prêtre attendant sa nomination quelque part, on ne savait où. Loin peut être… Remarque totalement innocente ayant poussé le comte Olivier de La Fère à faire pression sur l’évêque pour donner au frère de la belle une cure sur son domaine, celle qu’il venait de présenter, par cette charmante petite chapelle qui était désormais à eux. Ne pas la laisser s’échapper. Il était gentilhomme. Il aurait pu la forcer, seigneur de la région, ayant droit de haute et basse justice. Il préférait l’avoir dans les règles. Et c’était peut-être le moment propice. Olivier prit la main de la jeune femme, et mit un genou à terre.

-Anne de Bueil, voulez-vous m’épouser ?

La jeune femme eut du mal à dissimuler sa satisfaction, une fois son premier trouble passé. Enfin, sa vie allait changer ! Il lui faudrait dissimuler la marque les premiers temps, mais cela irait, à force d’onguents et de massage, elle avait déjà été considérablement résorbée, même si Anne savait pertinemment qu’elle ne disparaitrait jamais. La jeune femme retira la main que le comte avait prise dans la sienne, et baissa les yeux. L’aimait-elle ? Sans doute un peu, plus qu’elle n’aurait dut, certainement. Elle ne voulait qu’une chose, être à l’abri de la vie morne et misérable que le couvent avait failli lui offrir, et là, face à cet homme, jeune, grand, beau, elle avait la certitude qu’elle pourrait être heureuse. Jean apprendrait à se taire, et la cure lui permettrait de récupérer sa vocation première.

-Eh bien, vous ne répondez pas ? Demanda-t-il doucement.

Elle décida de minauder un instant, de faire semblant d’hésiter. Après tout, accepter directement et avec trop d’empressement pourrait passer pour de l’opportunisme, ce qui était un peu le cas il fallait bien l’avouer.

-Monseigneur, je suis noble, certes, mais pauvre, n’ayant aucune dote, aucun appui autre que mon frère et je… vos amis riront de vous, à cause de moi.

-Alors je les ferai taire, épousez-moi…

Elle releva les yeux vers lui, et ce fut un oui silencieux qui brilla dans son regard.

---

-Non ! Non !! NON !! Je refuse de célébrer ce mariage !

Dans la petite maison qui leur avait été allouée près de la chapelle où il officierait, Jean fulminait. Il refusait catégoriquement de risquer de perdre sa douce. Et pourtant, depuis la nuit qui avait suivi leur échappée du couvent, il ne l’avait pas pu toucher.

-Vous savoir dans les bras de ce, de cet… Les mots m’en manquent ! Il en est tout simplement hors de question.

Dans une charmante robe lilas, fine, ravissante, à la dernière mode quoi que sobre, les cheveux retenus en un sage chignon, dans son fauteuil près de la fenêtre, Anne le regardait faire, le regard froid, distant. Elle attendit que le flot de colère se fut tarit pour le tancer sévèrement.

-Avez-vous fini ?

Le ton fit son effet et comme d’habitude, Jean battit en retraite, attendant le coup. Il l’aimait trop pour ne pas la laisser faire.

-Nous devons tout au comte, vous m’entendez ? Tout ! Alors oui, je l’épouserai, et pour cela, je me passerai de votre permission. Mieux, vous célébrerez la noce, en toute simplicité, je ne veux pas d’un grand mariage, cela dénoterait trop avec la simplicité de notre condition. Et quand le comte viendra vous demander ma main, car en gentilhomme il le fera, vous accepterez immédiatement, ai-je été assez claire ?

Jean baissa la tête, soumit, alors que la jeune femme se levait, alternant chaud et froid avec le jeune prêtre. Posant ses mains sur son torse, elle chercha son regard, se faisant plus douce.

-Songez qu’à chaque fois que je viendrais me confesser, nous serons seuls…

Le visage de Jean s’éclaira. Elle se mordilla les lèvres dans un geste enfantin et charmant, avant de défaire le cordon fermant la chemise de son « frère ». Après tout, quel autre sûr moyen de se l’attacher ? Il était désormais bien loin le prêtre attaché à ses principes…

---

Le comte vint demander la main d’Anne au père Jean, qui accepta, et qui célébra le mariage quelques jours plus tard. A la main de la jeune femme brillait la bague appartenant jadis à la mère du comte, donné à elle par son époux le jour de leurs noces, perpétuant une tradition familiale. Le bonheur tient parfois à peu de chose, mais un mensonge trop gros peut parfois tout gâcher.

---

-Anne, prenez garde ! N’allez pas si vite !

Mais, ne prêtant absolument pas attention aux mises en garde de son mari, ivre de liberté, la jeune femme, montée en amazone sur cette magnifique jument grise qu’il lui avait offerte quelques semaines plus tôt, accéléra l’allure. Cela faisait un an et demi qu’elle était mariée au comte. Comtesse Anne de la Fère… Ce nom résonnait doucement à ses oreilles. Tout était parfait. Elle n’avait pas encore donné d’héritier à son époux, du moins le croyait-il… D’ici peu, ce soir, elle lui annoncerait qu’elle était enceinte, une fois qu’ils seraient seuls… Elle n’en doutait pas, il serait fou de joie. Des mèches blondes s’étaient échappées de son chignon alors qu’à la poursuite du cerf, ils s’étaient séparés en petits groupes, Olivier ne voulant pas quitter Anne. Dix-huit ans, la beauté et l’intelligence incarnée. Elle était parfaite et il ne voyait pas sa vie sans elle. Elle se détourna, et lui offrit un sourire mutin, avant de partir d’un grand éclat de rire.

La seule ombre au tableau était sans doute Jean. Jean qui avait commencé à la menacer. L’air de rien, bien sûr, mais tout de même. Heureusement, Anne, sans se laisser impressionner, lui avait répondu que si elle tombait, il tomberait avec elle. La scène avait été épouvantable. Jean avait assuré préférer mourir avec elle plutôt que vivre loin d’elle. Il avait fini par tomber à ses pieds, repentant, comme d’habitude, mais la jeune femme sentait bien qu’il commençait à lui échapper. Et elle ne savait pas encore comment faire pour remédier à la situation, mais cela ne l’inquiétait pas, elle avait toujours réussi à se tirer de toutes les situations jusque-là, elle y arriverait encore, non ? Soudain, son cheval mit le pied dans une ornière, trébucha, et s’écroula au sol. Anne, n’ayant rien vu venir, fut projetée sur le côté et sa tête alla heurter un arbre à quelques mètres de là, sombrant dans l’inconscience.

-ANNE !

Olivier sauta à terre pour se précipiter vers la jeune femme, sans considération aucune pour la jument dont la jambe avait sans doute été brisée par la chute et qui hennissait pauvrement. Prenant son épouse dans ses bras, s’assurant qu’elle respirait encore, et il entreprit de délasser sa robe pour la laisser respirer. Dans son inconscience, Anne eut un petit gémissement qui rassura son époux. Mais alors que sa robe glissa légèrement, le laçage défait, sa manche gauche glissa, dénudant son épaule, et le comte de la Fère en blêmit d’effroi. La fleur de lys… Cette marque… Celle des voleurs, des filles de joies… Il avait donné son cœur, son nom à une putain ! Après le premier étonnement, une colère noire s’empara du comte de la Fère, une rage folle. Prit d’une volonté vengeresse, il marcha jusqu’à sa monture, et prit une corde qu’il avait attachée à sa selle pour ramener la bête qu’ils traquaient depuis le matin. Aveuglé par sa rage, il passa la corde autour du cou de son épouse, avant d’en jeter l’autre pan à une branche, et de l’y hisser, pendue. Anne n’avait pas repris connaissance. Il l’abandonna là, sans plus de considération, hagard de s’être laissé tromper.
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Charlotte de Winter
♕ Je suis Charlotte de Winter
On l'appelait
♠M.I.L.A.D.Y♠

♟ Complots : 150
♟ Arrivée à Paris : 02/07/2012
♟ Localisation : Surtout là où on ne m'attend pas
♟ Profession : Espionne




Sous le sceaux du secret
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Jeu d'espion: Au service du cardinal
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MessageSujet: Re: « On l'appelait Milady » « On l'appelait Milady  »  I_icon_minitimeLun 2 Juil - 8:20


Comment survit-elle ? Elle-même n’aurait pu le dire. Dans sa précipitation, le nœud sans doute, avait été mal fait, c’était la seule explication. Une éternité passa, et il faisait nuit quand la branche du vieux chêne, sous le poids de la jeune femme, céda. Ce fut la chute qui, sans doute, lui rendit toute sa connaissance. Elle respira avec difficulté et mit du temps à récupérer son souffle, ne comprenant pas ce qu’il lui était arrivé. Elle essaya de rassembler ses souvenirs, la chasse… la séparation, la course qu’elle avait essayé d’initier contre son époux, et la chute de cheval, puis, plus rien. Elle sentit alors l’air glacé de la nuit contre la peau de son bras, restée sensible malgré les nombreux soins qu’elle lui prodiguait. Son corsage délassé… Sa robe ouverte, et son bras à la vue et au su de tous… Il avait vu… il savait tout ! Et il l’avait pendue ! Le cœur d’Anne manqua un battement, et elle fut parcourue d’un frisson glacé, alors qu’elle entreprit de se débattre pour se débarrasser de la corde qui lui enserrait le cou. Elle était perdue, elle ne pouvait rien y faire. Se regroupant sur elle-même, elle se mit à pleurer toutes les larmes de son corps, l’enfant isolée transparaissant encore souvent derrière les traits de la femme assurée et distante qu’elle s’essayait d’être. Peu à peu, le flot se tari, et alors qu’elle entreprenait de réfléchir, la raison et la réflexion reprenant toujours le dessus chez cette femme aux multiples ressources, elle sentit une vive douleur la prendre au bas ventre. Un cri étouffé tenta sans succès de franchir ses lèvres, alors qu’elle se regroupait sur elle-même, des larmes de haine coulant le long de ses joues. L’enfant… Le fils d’Olivier était mort, et ce par les actions du jeune homme, un homme que malgré tout elle avait appris à aimer. Elle venait de faire une fausse couche.

---

Ce fut le corps perclus de douleurs et le cœur vide qu’elle se présenta chez Jean, qui, croyant voir un fantôme, lui ouvrit la porte.

-Mais que… Je vous… Vous n’êtes pas…

-Morte ? lui répondit-elle froidement. Non, on ne tue pas le diable…

Le ton était sec, glacial. Elle entra dans la petite maison, se retenant de s’effondrer sur le premier fauteuil venu. Elle se figea, en voyant les bagages de Jean préparés. A le bien regardé, il portait effectivement des vêtements de voyage. Le front bas, sans oser regarder la jeune femme dans les yeux, il avoua.

-On est venu me prévenir que le comte était rentré seul de la chasse, que vous aviez disparut. Il était totalement hors de lui, comme fou. Et j’ai voulu…

-Sauver votre vie, quoi de plus normal ? railla-t-elle.

Elle oubliait un peu facilement qu’elle avait fait la même chose à Lille, deux ans auparavant. Mais cela n’avait aucune importance. Elle voulait se reposer ? Elle n’en ferait rien. Elle n’en avait pas le temps. Sans laisser plus de temps à Jean, elle gravit les escaliers, uniquement menée par cette volonté de survivre, cet instinct animal qui la maintenait en vie depuis la mort de ses parents. Dans la chambre qui, brièvement, avait été la sienne dans cette maison, elle ouvrit la penderie, se débarrassant seule des vêtements souillés de sang, sans un regard pour eux. Son cœur s’était fermé. Un bref instant, elle croisa son reflet dans le miroir et elle se figea pour se contempler. Voilà son vrai visage. Blême, défait, et la marque de la corde qui avait laissé une ombre bleu à son cou ne faisait que parachever le tableau. Jean avait eu raison de s’effrayer. Seule dans sa petite chambre, elle se changea, et entreprit de récupérer un visage un peu plus humain. Elle ajouta une étole foncée autour de son cou, et plaqua ses longs cheveux blonds en un chignon sage, sobre. Il lui fallait partir, au plus vite, sans aucun moyen qu’on la reconnaisse. Une cape sombre paracheva l’ensemble. Rapidement, comme certaines grandes dames le faisaient, elle se tailla un loup noir dans un bout de tissu qu’elle plaqua dans son visage, sans se rendre compte que Jean, sur le pas de la porte, ne cessait de l’observer. Dans la même petite malle que celle avec laquelle elle était arrivée, ne possédant rien, ou presque, elle entassa trois robes, les plus simples, deux chemises de nuit, son matériel de toilette et de l’argent.

-Où allons-nous ? Finit par demander timidement le jeune homme.

Anne, qui venait de mettre au feu la robe qu’elle portait quelques instants auparavant, et dont la consumation dégageait une étrange odeur, se figea. S’en était trop pour elle. Froidement, elle tourna son visage vers le jeune prêtre. A l’instant précis, il eut cru voir Elis, déesse du chaos et de la vengeance. Elle partit d’un rire froid, glacial, effrayant.

-« Nous » ? Mais il n’y a pas de « nous », Jean. Il n’y en a jamais eu ! Ne comprenez-vous donc rien ? Je ne vous aime pas, ne vous ai jamais aimé. Tout ce que j’ai fait, je l’ai fait pour moi et moi seule !

Une furie. C’était ce qu’il avait l’impression de voir en face de lui. Il en resta interdit. Devant lui, l’ange qu’il avait aimé passionnément se révélait démon et il en venait à se maudire d’avoir pu la croire un jour. Elle avait détruit sa vie… Pourtant, malgré tout, il fut incapable de réagir quand elle passa à son côté, son sac à la main, masque sur le visage et capuche rabattue sur la tête. Qu’il fasse ce que bon lui semblerait, Anne s’en lavait les mains. Elle voulait fuir, à nouveau, loin. Où, elle ne savait pas encore, mais tout recommencer, encore une fois. Cela lui faisait peur certes, mais moins que la mort qu’elle avait frôlée d’encore plus près. C’est sans un mot qu’elle s’engouffra dans le petit escalier, oubliant la vie qu’elle laissait, brisée, derrière elle.

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-We’ll leave in a few minute, my lady, lui annonça le capitaine alors qu’elle était sur le pont.

-Thank you, sir, répondit-elle simplement.

Anne se sentait mal. Depuis quelques jours, la fièvre ne la quittait pas, ou peu. Elle était à bout, avait trop forcé. Elle avait fuie le Berry au plus vite, loin, et ce n’était qu’à son arrivée à l’Est de la Bretagne, en entendant deux anglais devisés à côté d’elle, que l’idée lui était venue. Pourquoi ne pas traverser la Manche ? Aller là d’où venait son père ? Là-bas personne ne la connaissait, et personne ne la reconnaîtrait. Elle pourrait dissimuler sa marque, au pire, inventer un mensonge, et ainsi vivre comme elle l’entendait. S’inventer une vie, trouver confort et protection. Pourquoi pas ? Pourtant, elle se sentait lasse, mal à l’aise, ne dormait pas ou mal, et souvent était prise d’une montée de fièvre dont elle ne connaissait pas la cause. Et contrairement à ce qu’elle pensait, l’air du large, à Calais, ne lui avait fait aucun bien. Elle était encore plus pâle qu’à l’accoutumée, le teint blafard, les yeux vitreux. Heureusement, malgré le vent frais, il faisait beau, et elle ne se voyait pas descendre à fond de cale où le roulis du bateau accentuerait son malaise. Elle essayait de ne pas penser à Olivier. La marque autour de son cou s’était peu à peu dissipée. Elle allait fêter ses dix-neuf ans, seule, sans appui, mais sans personne non plus pour lui reprocher son passé. Jean ? Un vague souvenir, un outil rien de plus. Elle se sentait vieille malgré sa jeunesse. Le seul mal qu’elle ressentait était la perte de cet enfant. Enfant qu’elle aurait pu aimer, élever… Dieu, elle ne savait lequel, était tellement cruel parfois. Qu’avait-elle fait, sinon être la fille d’un amour interdit qui avait trompé les Eglises, catholique et protestante ? Un prix qu’elle n’était pas censée payer de prime abord.

Le froid la poussa tout de même à descendre dans la petite cabine qui lui avait été allouée. Elle avait saisi la conversation de deux marins anglais, la traversée serait longue, les courants étaient forts, et les vents contraires. Il faudrait compter le double du temps normal. Pourtant, il lui semblait que le bateau tanguait de plus en plus, et elle dut se retenir à la coque pour ne pas s’effondrer. Sa vision se troublait et la chaleur de la fièvre l’empli. Avant qu’elle n’ait eu le temps de comprendre ce qu’il lui arrivait, elle sombra dans l’inconscience.

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Ce fut des voix, anglaises, qui l’éveillèrent. Elle sentait toujours le roulis du bateau, et en déduisit qu’elle était toujours à bord.

-Ce n’est pas grave, disait une voix chevrotante, my lord, ne vous en faites pas. Je lui ai administré quelque potion qui fera tomber la fièvre, et la plaie a été désinfectée.

-Merci, docteur, voilà pour votre mal.

-Où… où suis-je ? murmura Anne, d’une voix outrageusement faible, peut-être un peu trop.

Elle avait pu jauger, entre ses longs cils mi-clos, la mine du « lord » en question. Jeune, plutôt bien fait, avec de longs cheveux châtains, elle le trouva tout de suite charmant. Etait-ce son sauveur ? Elle se souvenait de s’être évanouie. En la voyant revenir à elle, il se précipita à son chevet.

-Ah, madame, quelle frayeur vous nous avez causée ! s’écria-t-il.

La jeune femme avait assez brisé de cœurs malgré son jeune âge, pour savoir qu’elle venait de mettre un nouvel homme sous sa coupe. Et vu la magnificence de son vêtement, il était évident que le médecin ne l’avait pas appelé milord par simple complaisance. Le médecin, d’ailleurs, s’approcha de la jeune femme.

-Vous êtes toujours à bord, madame. Vous vous êtes évanouie, et ne serait-ce Milord de Winter, vous auriez sans doute périt.

-Monsieur… je veux dire My Lord, je ne sais comment vous remercier…

-N’en faites rien Madame, je n’ai fait que mon devoir. Si le docteur Reeves n’avait pas été à bord je ne sais comment nous aurions pu vous sauver.

-Et Milord a bien fait ! lança alors le médecin. Votre fausse couche a faillis vous être fatale…

Un silence de mort suivit l’indélicatesse brutale du médecin. Anne détourna la tête, et senti une larme couler le long de sa joue. Etait-elle sincère ? Rien n’était moins sure… Comme d’autres avant lui, lord de Winter se laissa prendre par le jeu et l’apparence angélique de celle qu’il avait secourue.

-Laissez-nous, docteur, voulez-vous ? demanda sèchement le comte.

Cela claquait plus comme un ordre, et le médecin semblant se rendre compte de l’indiscrétion qu’il avait commise, obéit sur le champ. Une fois la porte refermée sur lui, le jeune homme sourit doucement à Anne, avant de reprendre la parole.

-Je puis vous laisser également, si vous le désirez.

Il amorça un geste de se lever, mais Anne fut plus rapide.

-Oh je vous en prie Milord, n’en faites rien, je n’en peux plus de cette solitude qui me broie le cœur. Mais pardonnez-moi, je m’égare et vous devez avoir mieux à faire que de veiller une pauvre femme.

De Winter, qui n’attendait que cela, se rassis sur le petit tabouret. Que pouvait-il bien avoir à faire à bord d’un bateau en partance pour son pays natale ? Ses affaire en France étaient parfaitement organisées et il n’avait pas de meilleure idée que de tuer le temps en charmante compagnie.

-Ne vous en faites pas pour cela, mais pardonnez-moi, je ne me suis pas présenté dans les normes : Comte Edward de Winter, baron de Clarick. Quel est votre nom, madame ?

Au fond d’elle, Anne sut que c’était le moment ou jamais de changer de vie. Après tout, Anne de Bueil était morte, vulgairement pendue à un arbre sans autre forme de procès, par un époux qui l’avait haïe sans lui laisser le temps de s’expliquer. Elle se considéra déliée de tout serment, comme jadis elle s’était considérée libérée de ses vœux forcés qu’elle avait prononcé envers l’Eglise catholique.

-Je m’appelle… Charlotte, Charlotte Backson.

L’histoire qu’elle lui conta ensuite fut sortie si naturellement de ses lèvres qu’elle-même eut pu y croire. Jeune épousée d’un joailler de Lille, elle était enceinte de leur premier enfant, mais une commande impayée leur avait causé beaucoup d’embarras, et cela n’avait été qu’en s’empirant. Au bord de la faillite, et ne supportant pas le déshonneur, son époux s’était suicidé. Le choc de la nouvelle et la peine engendrée avaient déclenché la fausse couche de la jeune femme. Quand il s’étonna de son nom anglais et de sa parfaite connaissance de cette langue, elle répondit simplement qu’elle et son époux étaient anglais mais que la perfection de son art avait exigé un départ pour la France trois ans auparavant, lors de leurs épousailles. Edward sembla tout croire, jusqu’au dernier mot. Anne, ou plutôt Charlotte, n’en demanda pas plus…

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-Poussez, milady, vous y êtes presque !

Cette fois, sa grossesse, Charlotte l’avait menée à son terme, et elle était certaine que l’enfant serait en pleine santé. Que de choses s’étaient passées au cours de l’année qui s’était écoulée. Anne, elle l’avait oubliée, comme elle avait oublié le couvent, Jean, le comte de la Fère, et le bourreau de Lille dont seule la marque qu’elle continuait de soigner avec soin lui rappelait ce passé honni qu’elle voulait totalement occulter. Arrivés en Angleterre, Edward n’avait pu se résoudre à la laisser seule, certifiant qu’il était totalement immoral de la part d’un gentilhomme de laisser une dame en détresse seule et sans ressource. Elle avait protesté pour la forme, mais maintenant, il n’en était plus rien. Edward avait mené Charlotte jusqu’à sa demeure, où il l’avait présentée à son frère cadet, le baron de Sheffield, comme une amie. Une amie un peu trop proche. Charles, de son prénom, fut tout de suite éblouie comme son frère par la beauté de la jeune femme, mais elle n’avait aucun intérêt à se perdre aux yeux de l’aîné aussi repoussa-t-elle les avances du cadet, et bien lui en pris, vu ce que les servantes mises à son service murmuraient au sujet du baron. Il y avait de quoi rire, il changeait de maitresse comme de chemise. Après quelques semaine passés chez eux, Charlotte fit mine de vouloir les quitter. Edward, ne pouvant s’y résoudre, la demanda en mariage. Demande qu’elle accepta immédiatement. Le mariage fut célébré en grande pompe, contrairement à son premier qui avait été fait en toute intimité. Les hommes purent être éblouis par sa beauté, les femmes purent en prendre ombrage. Très vite, elle annonça à Edward qu’elle était enceinte, ce qui le ravit. Contrairement à sa relation avec le comte de la Fère, elle ne laissa rien au hasard, préférant garder la chambre. Elle était ainsi certaine de garder l’enfant, se confortant ainsi une position assurée au côté de son époux qui ne pourrait la répudier.

-Un dernier effort, je vous en conjure, murmura la jeune sage-femme qui semblait presque aussi nerveuse que la future mère.

Charlotte obéit, et dans un dernier cri, elle fut délivrée de l’enfant.

-Un fils milady, c’est un garçon !

Charlotte se laissa aller contre les oreillers. Elle avait réussi ! Son fils… un héritier. Elle était certaine de rester là où elle était.

Une fois le lit nettoyé et la jeune mère ayant repris un meilleur visage, Edward fut autorisé à passer la porte, et le charmant tableau qui lui fut présenté ne put que le ravir. Son épouse, tenant son fils dans ses bras. Cela ne dura que quelques instants, le jeune père ayant décidé d’aller fêter la nouvelle avec son frère et quelques amis. Tout était parfait, ou presque…

Tard dans la nuit, alors que Charlotte s’était assoupie, et que leur fils, appelé John Francis de Winter, baron de Clarick, eut été emmené par sa nourrice, Edward rentra, légèrement éméché. Il n’avait jamais eu un comportement déplacé à l’égard de son épouse. Il l’observa dormir, se disant qu’il avait une chance incroyable. Des commérages sur elle, venant de partout, à commencer par son frère, il n’en avait cure. Elle lui avait donné un héritier et c’était tout ce qu’il lui demandait. Son épouse bougea un peu, dans son sommeil. Les formes amplifiées par la grossesse attisèrent le désir d’Edward, qui pourtant ne bougea pas. Il savait bien qu’il lui faudrait plusieurs jours avant de pouvoir parcourir à nouveau ce corps meurtri par l’accouchement. C’était le prix à payer. Pourtant, à la lueur du feu et des bougies, une forme sur l’épaule gauche de son épouse l’intrigua. Une marque. Cela pouvait être une ombre, ou un trouble dû à l’alcool… Pour être sûr, il décida de s’approcher. Et ce qu’il vit le dégrisa immédiatement. Il avait passé assez de temps en France pour savoir ce que la flétrissure signifiait. Lentement, il recula, et se laissa aller dans un fauteuil, observant Charlotte sans cesse. Cela dura un peu plus d’une heure, avant que la jeune femme ne finisse par ouvrir les yeux, et, apercevant son époux, lui offrit un magnifique sourire.

-Vous êtes là…

-Plus de faux semblants, madame !

Charlotte fronça les sourcils, surprise.

-Que voulez-vous dire ?

-J’ai vu…

-Vu ? Mais vu quoi, mon amour ?

-Ne m’appelez pas ainsi ! Vous êtes une menteuse, une voleuse, pire peut être… Comment osez-vous me regarder en face ?

-Mais enfin, Edward, je vous en prie, calmez-vous, et expliquez-moi ?

-La marque, madame ! Je l’ai vue.

-Vous êtes ivre, monsieur, s’exclama-t-elle, mais elle avait pâlit, et ses traits s’étaient durcis. Edward n’avait pas pu ne pas le remarquer. Je suis lasse, laissez-moi, je vous en conjure, et allez cuver votre vin dans vos appartements. Je ne pensais pas que la joie de vous donner un héritier pouvait à ce point vous faire perdre le sens du commun !

Edward domina sa rage, avant de se dresser d’un bon sur ses pieds, s’approchant du lit sur lequel il s’assit, prenant le bras de la jeune femme pour le dénuder et découvrir totalement la marque. Charlotte soutint son regard, animal blessé mais prêt à attaquer et se défendre jusqu’au bout.

-Je vous laisse le temps de vous remettre, madame, avant de décider de votre sort et de celui de votre fils. Car oui, madame, comment puis-je être assuré qu’il est bien de moi ? A la vérité, vous vous êtes révélée très vite enceinte après l’échange de nos anneaux…

Et ce fut sur cette ultime remarque, laissant sa jeune épouse catastrophée, que le comte de Winter quitta la place. Anne se laissa retomber sur les oreillers. Il était temps d’assurer totalement sa position.

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Une ombre se mouvant avec encore quelques difficultés dans l’obscurité de la nuit au château. Charlotte ne croisa personne. La sage-femme avait laissé là plusieurs de ses poudres, que des mois à l’infirmerie du couvent avaient permis à la jeune femme d’apprendre et de reconnaitre. Elle savait quelles associations pouvaient sauver, et au contraire, lesquelles pouvaient tuer. Aussi silencieuse qu’un fantôme, la jeune femme pénétra dans la chambre de son époux, et, sans un bruit, déversa le contenu de la petite fiole dans la carafe d’eau qu’il vidait totalement chaque nuit, dans son demi-sommeil. Il n’y avait plus qu’à attendre…

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-Milady ! C’est grand malheur ! s’écria sa femme de chambre en entrant chez elle.

Le jour s’était à peine levé, et Anne feignit d’être encore totalement épuisée par l’accouchement de la veille. A la vérité, elle n’avait pas dormit et ses muscles tendus dans l’attente lui faisaient mal.

-Que se passe-t-il, voyons, Lucy, calmez-vous !

Les yeux rougis, la jeune fille eut un hoquet et des sanglots avant de réussir à reprendre assez de respiration pour répondre.

-C’est Milord, il est au plus mal. Les excès d’hier sans doute.

Charlotte, feignant la catastrophe, se débarrassa de ses draps et couvertures avant de se lever.

-Milady ce n’est pas raisonnable !

Mais elle foudroya la jeune femme du regard avant de réussir à se trainer, exagérant outrageusement son mal, vers les appartements de son époux. Le médecin, penché sur lui, avait la mine grave.

-Monsieur, je vous en prie, dites-moi tout ! s’exclama la jeune comtesse.

Elle fut reconnaissante à la providence qui avait mené Charles à Londres pour « affaires » soit disant. James dans son lit ne connaitrait jamais les menées de sa mère pour lui, et c’était heureux !

-Un mauvais vin, sans doute, Milady. Je ne saurais vous en dire d’avantage. Il est au plus mal.

-Va-t-il survivre ? la détresse dans la voix de la jeune femme sonnait tellement juste, surtout accompagnée de la larme qu’elle y mit que le médecin ne se douta pas un instant de ce qu’il se tramait. Et puis qui aurait bien pu accuser une femme qui avait accouché la veille et qui aurait dut encore être au lit à l’instant précis ?

-Je l’espère, milady, le comte est fort. S’il passe la nuit qui vient, il sera surement sauvé.

La seule preuve du trouble de Charlotte fut sa main qui se serra, ses ongles s’enfonçant dans sa peau jusqu’au sang, mais qu’on pouvait imputer à l’incertitude du diagnostic. Il ne tenait qu’à elle que le comte ne passe pas la nuit…

---

Le soir venu, la jeune femme se glissa à nouveau entre les couloirs, tout aussi silencieuse. Elle se doutait bien que le médecin avait laissé un garde malade auprès d’Edward. Mais il devait surement s’agir du vieux Lauren, qui n’entendait plus grand-chose et n’y voyait pas plus, valet du feu comte le père d’Edward et Charles. Elle poussa la porte qui grinça légèrement sur ses gonds, mais ne provoqua aucune réaction. Le vieux valet s’était endormi sur sa chaise, et ronflait allègrement. Son époux semblait avoir retrouvé le calme d’un sommeil presque non agité. Charlotte eut un léger frisson. Allait-elle vraiment faire ce qu’elle avait prévu ? Il le fallait. Pour elle, mais aussi pour John, son petit chéri, elle refusait qu’il ait une vie aussi aléatoire que la sienne ! Sa vie serait belle, il hériterait de ce comté et des titres de son père, de son oncle aussi peut être vu la vie qu’il menait, et elle aurait ce qu’elle était venue chercher. L’assurance d’une vie meilleure. L’image de son fils dormant dans son berceau en tête, Charlotte contourna le lit, et saisit un oreiller, assurée qu’elle faisait ce qui était juste, puis, après une dernière inspiration, l’appuya de toutes ses forces sur le visage de son époux. Edward, déjà considérablement affaiblit par le poison, lutta moins d’une minute, et en silence. Pour s’assurer qu’elle avait réussi, elle resta ainsi en position une minute de plus, avant de reposer l’oreiller comme si de rien n’était, et de quitter la pièce. Le vieux serviteur ne s’était pas réveillé. Le jour lui annonça qu’elle était officiellement veuve. Veuve, jeune, belle, riche, et avec une position assurée. Ses malheurs étaient enfin terminés, à presque vingt et un an, sa vie pouvait commencer !

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-Tout compte fait, Ketty, je mettrai la bleue, le duc aime cette couleur…

-Et elle s’harmonise parfaitement avec votre teint, Milady.

Charlotte sourit, satisfaite. Elle avait rallié son autel de Londres une semaine auparavant, naviguant entre le château familial et Londres où tout se passait, un peu comme Paris en France de ce qu’elle en savait. Ce soir, elle recevait, en petit comité, certes, mais que le meilleur. A commencer bien évidement par Georges Villiers, le duc de Buckingham. Charlotte avait depuis longtemps jeté son dévolu sur le favori du roi, qu’elle avait rencontré quand son beau-frère l’avait introduite à la cour, à la fin de son veuvage, un an après le décès d’Edward, comme il était de coutume. Une chose absolument certaine était ressortie de cette période : le noir ne lui allait pas du tout ! Elle devait s’assurer de ne plus avoir à porter cette couleur. Elle n’était de toute façon faite que pour l’éclat de ces couleurs vives qui étaient à la dernière mode, parvenant des colonies ou autre. Cela faisait deux ans qu’elle avait réussi à s’immiscer dans la cour anglaise, à faire taire les ragots sur sa personne par une attitude sans reproche, cultivée mais réservée, la première en religion, sans verser dans le puritanisme, bigoterie anglicane, et toujours avec un goût exquis. Un an auparavant, environ, elle avait pris à son service la petite Ketty, jeune sans doute, mais sans nul doute dégourdie, intelligente et prévenante, tout ce qu’on attendait d’une femme de chambre en somme. Et de plus, elle avait apparemment une vertu sans tâche, ce qui rassurait totalement sa maîtresse, elle n’irait pas faire l’idiote entre les bras du premier valet venu, ou d’un quelconque nobliau à l’image de son beau-frère, que la petite serait amenée à fréquenter souvent, un peu trop sans doute, et Charlotte connaissait les vices de Charles.

Mais ce soir, il ne serait pas là, et elle refusait de se gâcher la soirée à cause d’un absent, il était déjà assez insupportable quand il était là, ne cessant de lui faire mille reproches à mots couverts, et réitérant souvent ses avances. Elle faisait mine de ne pas les comprendre, ou faisait passer leur relation comme impossible, elle était la veuve de son frère, donc sa sœur. Charles en était pour ses frais. L’horloge sonna six heure trente. Les invités ne tarderaient pas à arriver, et, elle l’espérait, le duc en tête. Il avait déjà décliné ses deux premières invitations pour des prétextes obscures et s’était excusé le lendemain de n’avoir pas pu venir à celle qu’il avait acceptée. Charlotte en avait été pour ses frais, mais elle savait que la patience était de mise, et qu’il lui faudrait persévérer. Pourtant il ne fallait pas trop lui en demander. Quand le premier invité arriva, elle parut dans son salon dans sa merveilleuse robe bleu pâle, tout sourire. Les arrivées se succédèrent, quand Kitty parut, une lettre à la main. Charlotte cessa un instant sa discussion pour saisir ce que sa servante lui glissa à l’oreille :

-Milady, ce pli vient d’arriver, il est marqué du sceau du Duc.

Les traits de Charlotte se durcirent immédiatement, et, posant son verre, elle décacheta l’enveloppe, et parcourut les quelques lignes. Le duc, encore une fois, déclinait son invitation. Vexée, la jeune femme froissa le mot. Il fallait deviner ce que les lignes ne disaient pas. Elle ne l’intéressait pas. Ketty hésita avant d’ajouter :

-Son valet m’a dit qu’il s’était rendu chez Lady Vanns, et qu’il y passerait la nuit. Il le fait régulièrement depuis deux semaines…

Deux semaines… Charlotte en aurait hurlé de rage. Cela faisait un mois et demi qu’elle était à Londres ! C’était évident, maintenant, elle ne l’aurait jamais, et ça, il ne l’emporterait pas au paradis. Son premier mouvement de rage voulut qu’elle décommande toute la soirée, mais sa réputation en aurait été ruinée, aussi décida-t-elle de prendre sur elle.

-Mes amis, le duc de Buckingham vient de s’excuser, des affaires le retiennent, il ne sera donc pas des nôtres. Il était le dernier à ne pas être arrivé, passons donc à table, et dinons en pensant à ce qu’il manque, pour le bien de l’Angleterre à n’en pas douter.

L’Angleterre… Plus le temps passait et plus ce pays l’agaçait. Cet apparent flegme qui dissimulait les plus vils instincts, cette impression de toujours froisser quoi qu’il se passe. Cela en devenait lassant, vraiment. Elle avait eu la bonne idée de convier à sa table l’ambassadeur de France, avec lequel elle conversait dans un français parfait dont l’homme s’était d’abord étonné. Elle lui avait servi le même mensonge que celui qu’elle avait toujours gardé depuis qu’elle avait rencontré Edward à bord du bateau. Elle avait appris qu’il était cardinaliste, et que c’était pour ça que le duc de Buckingham voulait le chasser du pays au plus vite. La tension entre le premier ministre français et le premier ministre anglais était connue dans toutes les cours européennes, jusqu’à sa cause officiellement cachée, l’amour que tous deux portaient à la reine de France, qui avait vu son cœur se faire ravir par l’anglais, transformant le doux transport du cardinal pour elle en une haine farouche. Peut-être était-il temps de retraverser la Manche ? Mais pour cela, elle devait avant tout s’assurer que rien là-bas ne pourrait la rattacher à un passer qui était encore gravé sur son épaule. Juste avant de passer à table, elle avait profité du flottement chez ses invités pour modifier le plan de table et placer l’ambassadeur à son côté.

-Monseigneur, commença-t-elle en français, vous savez que j’ai eus des amitiés en France avant mon retour en Angleterre. On m’a rappelé il y a peu au souvenir d’une mienne relation, dont je n’ai plus eus de nouvelle depuis une éternité. Vous étiez encore en France il y a deux ans, aussi peut être le connaissez-vous et pourriez-vous m’en donner des nouvelles ? Il s’agit du comte Olivier de la Fère…

Pour se donner contenance, dissimulant la vive émotion que ce nom qu’elle n’avait pas prononcé depuis plus de cinq ans élevait en elle, elle plongea ses douces lèvres dans son verre, alors que l’ambassadeur réfléchissait.

-Le comte de la Fère… Un domaine dans le Berry, c’est cela ? Eh bien madame, il me semble que je sois donc porteur de mauvaise nouvelle. Il serait mort.

-Vr… Vraiment ? murmura-t-elle, dissimulant sa joie et un soupir rassuré.

-Oui, un accident de chasse, me semble-t-il, mais il y a bien des années de cela. Lui et son épouse auraient péris. Elle est tombée de cheval, et en voulant l’éviter, il l’a suivie. Voilà tout ce que je peux vous dire sur lui.

-J’en suis désolée…

Elle laissa la conversation courir vers des sujets plus légers, et attendit la fin de la soirée pour revenir à son premier sujet, assurée que personne en France ne pourrait se mettre en travers de sa route. D’un geste, elle fit comprendre à l’ambassadeur d’attendre et d’être le dernier à partir. Une fois seuls dans le salon, elle lui offrit un verre de vin de Bourgogne, avant d’en venir au fait.

-Monsieur, je sais les problèmes que vous cause le duc de Buckingham. Et vous me voyez désolée de risquer de perdre un homme que j’ai appris à considérer comme un ami…

-Vous me comblez, Milady.

-Du tout, du tout. A la vérité, cela m’ennui tellement et la France ayant été une telle terre d’accueil à l’époque où plus rien en Angleterre ne nous était propice, à mon premier époux et à moi, que je me demandais s’il n’y avait pas, d’une manière ou d’une autre, un quelconque moyen pour que je puisse vous aider ?

Le regard de l’ambassadeur brilla d’une flamme nouvelle. Ainsi donc, elle se voulait espionne… Il réfléchit un instant, avant de se dire que pourquoi pas… Avec son joli minois, personne ne la soupçonnerait… Il lui fallait en parler avec le Cardinal, et lui présenter cette recrue d’élite qui, il n’en doutait pas, saurait brouiller les pistes. Et encore, il était à mille lieux de savoir à quel point…

---

Un mois plus tard, Charlotte embarquait pour la France, après avoir embrassé son fils qu’elle avait laissé au manoir familial. John avait l’habitude que sa mère s’en aille, mais aussi longtemps ? Elle n’avait pas précisé la durée de son séjour, et ne savait pas quand elle reviendrait. John, comme elle, devrait faire avec. Un nouveau chapitre de sa vie commençait…


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Armand du Plessis
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♟ Complots : 272
♟ Arrivée à Paris : 10/10/2011
♟ Localisation : Paris
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Sous le sceaux du secret
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MessageSujet: Re: « On l'appelait Milady » « On l'appelait Milady  »  I_icon_minitimeLun 2 Juil - 16:08


Félicitations à toi, courageuse Cardinaliste, tu es validée ! Son Éminence a apprécié ta loyauté et ton intelligence, et accepte de te recevoir auprès d'elle.

Tu devrais courir à son palais pour lui témoigner ta reconnaissance, mais avant voilà quelques endroits qu'il faudrait que tu ailles vite visiter :
✘ Viens te faire quelques amis par ici !
✘ Commence donc à rp par !
✘ Viens te trouver une maison dans ce sujet !
✘ Ne reste pas sans rang ! Viens en demander un céans !

Un petit message personnel pour te faire savoir, que j'ai adoré, pardon j'ai dévoré ta fiche ! What a Face Le roman ne m'a pas faite reculer du tout ! Un vrai plaisir que de te lire ! Une milady haute en couleurs ! Je sens qu'on va faire de grandes choses ensemble !!! Have fun et tue Athos et Buckingham, tu coucheras avec Fassy ! Laughing Sois la bienvenue, tu es ma première validation, c'est beau ! cheers
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Charlotte de Winter
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♟ Arrivée à Paris : 02/07/2012
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MessageSujet: Re: « On l'appelait Milady » « On l'appelait Milady  »  I_icon_minitimeLun 2 Juil - 16:18

Merciiiiii Monseigneur What a Face je ne vous décevrai pas


Message personnel : MOUHAHAHAHA ravie que ça te plaise vu la pression que je me suis foutue pour cette fiche (tu sais pourquoi Rolling Eyes) je peux pas coucher avec Fassy AVANT? (a)
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Marie-Aimée de Chevreuse
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MessageSujet: Re: « On l'appelait Milady » « On l'appelait Milady  »  I_icon_minitimeLun 2 Juil - 16:55

Pout M'en fous j'en veux pas de Fassy ici!

Félicitation Miss et trop contente de te voir dans le coin ** j'attaque ton romans dès ce soir et courre vers ta fiche de liens What a Face



Dernière édition par Marie-Aimée de Chevreuse le Lun 2 Juil - 16:57, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: « On l'appelait Milady » « On l'appelait Milady  »  I_icon_minitimeLun 2 Juil - 16:57

Eh bien voilà qui est dit, duchesse, nous n'en auront pas après les mêmes seigneurs What a Face


Merciii ma twinette ** j'ai hâte que tu me donnes ton impression =D
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Marie-Aimée de Chevreuse
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MessageSujet: Re: « On l'appelait Milady » « On l'appelait Milady  »  I_icon_minitimeLun 2 Juil - 16:58

Ah Richou, désolée de me montrer si désobligeante, mais tu as loupé un truc What a Face
Cess, tu as du prendre l'ancien code de la fiche de présa: il inclu à présent une petite case à cocher, peux-tu la rajouter STP? Wink

*sort avant que Richou ne la fasse exiler*
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MessageSujet: Re: « On l'appelait Milady » « On l'appelait Milady  »  I_icon_minitimeLun 2 Juil - 17:09

Ah j'avais réglé l'histoire de la fiche de liens mal placée mais pas ça j'avoue, j'ai zappé ! Embarassed On est encore des novices nous aussi tu me diras, c'est notre première validation ! What a Face Du coup tu n'es pas exilée pour me l'avoir fait remarquer. Razz

Quant à Richou, tant mieux si vous n'en voulez pas très chère, il se gardera pour la seule blondinette qui en vaille la peine ! What a Face * se rappelle soudain que sa couz l'attend pour aller au ciné * Razz
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MessageSujet: Re: « On l'appelait Milady » « On l'appelait Milady  »  I_icon_minitimeLun 2 Juil - 17:56

Ah mince désolée j'ai pas eus le mémo Razz


Eh vous battez pas dans ma fiche de présentation hein XD (enfin je sais pour qui je prend partie What a Face)
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vous croyez que
je tiens à la vie ?

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MessageSujet: Re: « On l'appelait Milady » « On l'appelait Milady  »  I_icon_minitimeLun 2 Juil - 20:42

Bienvenuuuue ! Gaga

J'ai adoré ta fiche ! J'ai juste un tout petit truc à dire. Athos devient comte qu'après avoir épousé Milday, et encore l'épouse-t'il en secret pour que son père ne soit pas au courant (merci la Jeunesse des Mousquetaires).
Je suis trop heureux que tu sois là (je vais pouvoir te faire décapiter *.*) !
Bref, tu as fait de moi un homme heureux (ouais, enfin, heureux... je me comprends.) **
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MessageSujet: Re: « On l'appelait Milady » « On l'appelait Milady  »  I_icon_minitimeLun 2 Juil - 20:48

Désolée, j'ai lu que les trois mousquetaires pour ma part Razz

Contente que ça te plaise, mais tu comprendras que j'espère pas vraiment qu'on se croise en Rp, je tiens à ma tête mdrr (après les flashbacks y a moyen de moyenner XD)
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Athos
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Est-ce que par hasard,
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MessageSujet: Re: « On l'appelait Milady » « On l'appelait Milady  »  I_icon_minitimeLun 2 Juil - 20:52

Vraiment, tu veux garder ta tête ? Very Happy
Dans ce cas, réserve-moi un flash-back, je serais ravi de jouer un Athos fou d'amour prêt à tout pour être ton chevalier servant, vile créature. Ça pourrait être très amusant. Et puis, j'aime vraiment la façon dont tu écris !
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MessageSujet: Re: « On l'appelait Milady » « On l'appelait Milady  »  I_icon_minitimeLun 2 Juil - 20:54

Pas de problèmes ** ça me va, Charlotte - ou plutôt Anne à l'époque - encore à peu près innocente *out*
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MessageSujet: Re: « On l'appelait Milady » « On l'appelait Milady  »  I_icon_minitime

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